Catherine Cianci est une reporter-anthropologue Belge. Elle s'est fait connaître grâce à son fameux projet "Terre d'Aroma", un tour du monde de l'aromathérapie. Vous avez pu la retrouver tout au long du printemps 2012 en conférences gratuites avec Pranarôm.
Catherine Cianci nous a livré ses impressions sur cette aventure passionnante dans une interview découverte.
Catherine Cianci, vous avez réalisé un "tour du monde de l'Aromathérapie". Quelles étaient vos motivations au départ ?
Après quelques années dans le social et l’humanitaire, je n’étais pas encore parvenue à trouver mon épanouissement. Je me suis alors questionnée sur ce qui m'animait et sur ce qui me faisait vibrer. A l’évidence, je voulais refaire du documentaire et de la photo car c’était là la base de ma formation. En explorant les sites de tour du monde à thème, j’ai décidé de faire un tour du monde de l’aromathérapie. Mon but était de poser des visages humains sur l’aromathérapie dont on parlait de plus en plus. Rencontrer des acteurs de l'aromathérapie et du monde des huiles essentielles. Leur donner l'occasion de témoigner de leur vécu. Tout mon voyage a été construit sur des rencontres de professionnels. J'ai réalisé des interviews et des photos de producteurs, de distillateurs ou de thérapeutes, mais j’ai aussi investigué des projets sociaux en lien avec les huiles. Au total, j’ai vécu 15 mois merveilleux à la découverte des gens qui font l’aromathérapie d’aujourd’hui.
Comment utilisez-vous les Huiles Essentielles à titre personnel ?
J’ai toujours utilisé les huiles essentielles tant au niveau curatif que préventif. Pour mon tour du monde, j'ai fait le choix de n'emporter qu'une trousse de secours naturelle composée d'huiles et de compléments alimentaires. Dans les pays où les conditions d'hygiène étaient mauvaises, je prenais des huiles par voie orale en prévention. Et la seule maladie que j'ai contractée durant mon voyagé, c'est une grippe suite à un refroidissement. Autant vous dire que je suis une convaincue !
En tant qu'anthropologue, quelles sont les choses que vous avez pu noter au cours de votre voyage dans la relation des hommes avec les plantes aromatiques et l'aromathérapie ?
J'ai réalisé que si de nombreuses cultures utilisent les plantes aromatiques, les huiles essentielles sont généralement peu connues. A Madagascar, haut lieu de production d'huiles essentielles, la population locale utilise peu les huiles. En brousse cependant, ils utilisent largement les plantes médicinales et aromatiques. Sans doute parce que le premier centre de santé est parfois à des heures de marche. Dans les communautés, les gens utilisent plutôt les plantes aromatiques en décoction ou en tisane. En Inde, berceau de l'Ayurveda, il y a une longue tradition des plantes aromatiques mais elles sont plutôt transformées en savons, en poudres, en comprimés ou directement incorporées dans le repas. Les techniques de distillation ne font pas partie de la culture indienne. Cependant, tout comme à Madagascar, la population locale commence à les découvrir et à les utiliser. En parallèle, des producteurs locaux ont appris les techniques et se sont mis à distiller. Un pays que j'ai trouvé très intéressant au niveau de la médecine traditionnelle, c'est la Thailande. Le Ministère de la Santé y a mis en place des groupes de travail pour réfléchir à la manière de promouvoir la médecine traditionnelle. Dans plusieurs hôpitaux de Chiang Mai (nord du pays), le patient peut choisir de se faire soigner par l'allopathie ou par la médecine naturelle, voire de combiner les deux.
Vous avez noté une évolution intéressante lors de votre passage en Australie. Pourquoi ?
L'Australie est davantage un pays consommateur qu'un pays producteur, même si elle est réputée pour son huile de tea tree. Quand j'étais sur place, j’ai eu la sensation que l'Australie était en train de vivre un grand changement : la mise en place d'une médecine aromatique. Dans cette partie du monde, c’est l’aromathérapie selon l’école anglaise qui est surtout enseignée. Une des grandes différences avec l'aromathérapie selon l'école française, c'est que les huiles ne sont pas administrées par voie orale. Jusqu'il y a peu, il était interdit à un thérapeute de prescrire les huiles par voie orale. Plusieurs thérapeutes se sont battus pour changer cette situation. L'administration par voie orale est maintenant enseignée dans les écoles d'aromathérapie. Dans le même esprit, certains soins d’aromathérapie sont depuis peu remboursés par la sécurité sociale à condition que le praticien soit affilié à une association de médecines naturelles.
Qu’avez-vous retiré de vos séjours prolongés auprès des cultivateurs ?
Une chose m'a interpellée dans mon voyage. Dans tous les pays où j'ai rencontré des producteurs ou des gens qui travaillent la terre, ils m’ont tous parlé des changements climatiques. Il pleut au moment où il devrait faire sec, la saison des pluies tarde à venir, etc. Au Québec, on connait une grosse canicule en juillet et un hiver trop doux pour le pays. Ces perturbations se sont exprimées tout au long de mon voyage.
Un tel voyage est une expérience particulière. En quelques mots, qu'avez-vous appris sur la vie au cours de ce tour du monde ?
J'ai surtout appris à lâcher prise et à prendre davantage les choses comme elles viennent. Je suis une obstinée de nature et quand j'ai des objectifs en tête, je fais tout mon possible pour les atteindre. Ce dernier aspect n'a pas changé mais je le fais avec plus de quiétude, de souplesse et moins de stress. J'ai appris aussi à ne plus insister quand les choses que j'avais planifiées ne se mettaient pas en place. La plupart du temps, elles ont laissé la place à des rencontres ou à des opportunités que je n'avais pas imaginées au départ. Depuis mon voyage, je porte un autre regard sur ma vie, je savoure beaucoup plus ce que j'ai et ce que je fais. Je vis aussi davantage dans le moment présent.
Merci Catherine, et bravo !